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Épisode 0.4 : Un médecin tout seul, ça ne fonctionne pas – Bithiah Bemmi, IPS en soins aux adultes Épisode 4

Épisode 0.4 : Un médecin tout seul, ça ne fonctionne pas – Bithiah Bemmi, IPS en soins aux adultes

· 46:31

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Mais il faut prendre en considération les autres, leurs opinions, leurs idées, aussi.

Un médecin tout seul, il n'y aura pas de suite, ça ne fonctionnera pas.

Parce qu'il ne faut pas oublier que les infirmières, elles passent 8 heures par quart de
travail avec ce patient-là que nous, on va voir que de façon ponctuelle dans une

Bonjour et bienvenue à "Soigner jusqu'à se briser".

Je m'appelle Steven Palanchuck et aujourd'hui, dans ce quatrième épisode hors série, j'ai
le plaisir de vous présenter ma conversation avec Bithiah Bemmi.

Bithiah est infirmière praticienne spécialisée en soins aux adultes et elle travaille
principalement en médecine interne et aux soins intensifs à l'hôpital du Haut-Richelieu.

Elle est également chargée de cours à la maîtrise en sciences infirmières à l'Université
de Montréal.

On travaille ensemble déjà depuis plusieurs années et je peux vous dire que c'est toujours
un bonheur.

J'ai beaucoup de respect pour elle, autant pour son expertise que pour la personne qu'elle
est.

Dans cet épisode, on parle de travail d'équipe parce qu'on réalise qu'on ne peut pas
soigner seul.

On discute aussi de notre lien avec les patients et de ce qu'on ressent, même si on nous
apprend souvent à cacher nos émotions.

Et enfin, on parle de prévention parce qu'on attend trop souvent que ça aille mal avant
d'agir.

J'espère que cette discussion va vous toucher autant qu'elle m'a touché.

Prenons soin de nous pour mieux prendre soin des autres.

Bonne écoute.

Pourquoi t'as accepté de partager à ce balado?

Une des raisons principales, en vivant dans le quotidien des soignants dans différents
milieux,

je vais parler pour mon rôle d'infirmière praticienne, entre autres, il y a de la
souffrance.

On a beaucoup mis le dos sur le COVID, tout ce qu'on a vécu les dernières années, je
trouve qu'il y a de la souffrance auprès de nous-mêmes et des gens qui nous entourent, et

je pense que c'est important de l'adresser parce

ça reste un sujet encore assez tabou.

Elle vient d'où cette souffrance-là, d'après toi?

De un, parce que c'est difficile d'en discuter.

On est toujours sous pression.

On n'a pas le temps de s'asseoir et de discuter vraiment avec quelqu'un.

C'est ça qu'on aurait besoin de faire et on n'a pas le temps.

Il faut voir plus de patients, il faut donner les soins, il faut être là pour la famille,
il faut être là pour le patient, il faut être là pour les équipes, mais on oublie d'être

là pour nous aussi.

On oublie des fois d'être là pour nos collègues.

Mais le temps pour nous, on ne l'a pas.

Puis entre collègues, on ne l'a pas.

C'est pas en s'assoyant deux minutes sur le coin d'un bureau qu'on est capable de vraiment
aller en profondeur sur comment ça va.

C'est un peu ça que je pense aussi, que c'est difficile de trouver le bon moment, le bon
contexte pour faire ça, au-delà des salutations de corridor.

Puis on reste souvent en superficie, mais combien de fois on a observé des choses, on a
constaté des changements de comportements chez des collègues...

Parfois même chez nous-mêmes, quand on commence à se connaître, on reconnaît des signaux
d'alarme.

Toi, quand ça t'arrive, qu'est-ce que tu fais quand tu reconnais ça?

Pour moi, c'est important de me recentrer, de prendre une pause et de me requestionner.

Parce que depuis le jour 1, je me suis fait une promesse que j'essaie de garder pour le
reste de mes jours :

je dois être bien dans ce que je fais.

Si ça nécessite que je fasse des modifications au sein de mon travail, que ça nécessite
que je change de travail, dans mon parcours, je ne suis jamais restée au point où j'ai

commencé.

J'ai toujours évolué.

Et moi, c'est ça qui me rend heureuse.

Et si je ne pas capable de changer les choses qui me rendraient heureuse, je change ma
façon de penser.

J'ai aussi changé de milieu parce que des fois, mon milieu ne correspondait pas à mes
attentes.

Le mot peut-être, je te dirais, pour résumer tout ça, c'est de s'écouter et d'être capable
de dire "Je passe à l'action".

Pas juste s'écouter et se plaindre, mais aussi prendre l'étape suivante : de passer à
l'action.

Je pense que tu fais une bonne nuance parce que souvent on s'analyse ou on essaie de
comprendre des choses, mais on ne passe pas à l'action pour avoir des résultats

différents, il faut faire les choses différemment.

Je trouve ça bien que tu puisses avoir cette lucidité-là de dire, bien écoute, non, à ce
moment, ça ne correspond pas à mes objectifs, puis

de prendre action pour changer.

Pourquoi tu penses que ce n'est pas tout le monde qui est capable de faire ça?

Se questionner, c'est une chose, de passer à l'action, c'est autre chose.

Des fois, nos décisions vont avoir aussi une répercussion sur d'autres.

C'est ce qui est des fois difficile aussi, je pense.

Puis ça nous demande aussi d'aller de l'avant, puis des fois, de laisser tomber des choses
qui étaient peut-être importantes pour nous - ou qui nous semblaient plutôt importantes -

mais qui ne le sont pas.

On aime ça rester dans notre zone de confort, rester dans les éléments qu'on aime, qu'on
maîtrise bien, qu'on connaît.

Le changement fait peur, le changement est difficile.

Je pense que c'est une des raisons pourquoi des fois on se trouve toujours des raisons
pour dire, on ne peut pas, ce n'est pas le bon moment.

Je vais faire de la peine à quelqu'un.

Qu'est-ce que les gens vont dire?

Ce que les gens pensent a quand même beaucoup d'impact sur nous.

Puis on aime plaire, on aime que les gens nous reconnaissent, aussi.

Donc si on sait qu'on va poser des gestes qui vont déplaire aux gens, des fois c'est une
des raisons pourquoi on se retient aussi ou qu'on ne fait pas ces changements-là, je

pense.

Ça m'est arrivé en tout cas de me retenir à faire des changements ou de dire des choses
parce que je ne voulais pas déplaire.

Moi, j'ai été intimidé quand j'étais à l'école primaire,

et même secondaire, j'ai été humilié à quelques reprises.

C'est sûr que ce sont des expériences marquantes du regard des autres sur soi...

le dommage, le genre de blessure que ça peut occasionner.

Des fois, oui, c'est vrai, j'ai choisi la facilité pour garder le statu quo, de peur de ce
qui pourrait arriver, puis des changements que ça pourrait occasionner.

Mais tu as raison, puis je pense que ça nous est tous arrivé.

On a aussi cette pression-là d'avoir toutes les solutions à tous les maux, d'être capable
d'être là pour tout le monde, de donner son 100 % tout le temps.

Puis cette pression-là, on la vit dès le départ.

Moi-même aussi, j'ai cette pression-là, ce souci de performance, de toujours être bonne.

Tu aimes ça être reconnu par les gens, dire "Elle sait où elle s'en va, elle sait ce
qu'elle fait".

Tu te mets beaucoup, beaucoup de

pression. Il suffit d'une fois d'essayer et de dire "Ben non, je ne sais pas tout, je ne

pas parfait, j'ai droit aux erreurs puis de le dire.

C'est aussi important de ne pas juste le penser, de le dire.

Puis lorsque j'ai fait ça, je me suis rendu compte que, mon dieu, j'en meurs pas.

Je suis même mieux que j'étais, ça m'a fait du bien, ça m'a délivré de la pression que
j'avais.

Puis de me dire, bien tout ce que je craignais,

le regard des autres qui allait changer ou la pression que je me mettais en me disant
qu'est-ce que les gens vont penser, comment je vais être, je ne serai pas bonne, je ne

serai pas à la hauteur...

Finalement, ce n'était rien, à comparer de la souffrance que je pouvais avoir de garder ça
en dedans de moi.

Une fois que ça s'est dit, tu récoltes un peu ce que tu as semé de ces expériences-là et
tu essaies de faire de l'avenir un meilleur moment pour réaliser tout ce que tu vis

présentement et changer pour le meilleur.

Ça prend de l'humilité pour être capable de faire ça aussi, de reconnaître que justement
on n'est pas parfait.

Souvent, j'étais dans le marchandage avec moi-même, je vais faire ça, je vais continuer à
faire ça.

C'étaient des décisions qui étaient plus simples à prendre.

Mais de pouvoir avouer que justement, on n'est pas parfaits.

Que oui, on est des experts, mais qu'on peut se tromper, puis qu'on est humains, au fond.

C'est difficile.

T'as raison de cette humilité-là.

Puis une chose que j'ai réalisée aussi, c'est que les gens voyaient ce que je voulais leur
laisser voir aussi.

Puis dans le fond, je me disais, bien c'est toi, Bithiah, qui s'impose tout ça.

Puis c'est toi qui ne veux pas que les gens voient ta vulnérabilité.

Tu veux qu'ils pensent que tu es bonne, que t'es capable de tout faire.

Tout partait de moi, dans le fond.

Puis c'est ça que j'ai dû changer.

J'ai dû prendre conscience de ça, puis me dire, regarde, change-toi,

ta façon, tes exigences envers toi-même, ta façon de te voir pour que les gens puissent
voir qui tu es vraiment, Puis l'humilité, ça aussi c'est difficile de se montrer

vulnérable, mais pourtant tellement humain.

Puis c'est drôle parce que comme soignants, c'est exactement ce qu'on côtoie tous les
jours, la vulnérabilité des autres, mais nous on ne se laisse pas la place de l'être.

Alors que, quand j'ai été vulnérable avec des patients, ça a toujours été gagnant.

Ça a toujours amplifié la qualité de la relation.

Puis je pense que ça a permis à plusieurs patients de se reconnaître, de reconnaître la
part humaine en nous.

Puis de donner des soins humains.

On a tellement l'impression

qu'il faut performer puis que ce qu'on attend de nous, c'est d'être des experts.

On peut donner les meilleurs conseils avec les meilleures recommandations, suivre toutes
les lignes directrices, mais si le patient ne te fait pas confiance ou ne reconnaît pas ta

part d'humanité, il ne va pas les suivre, tes conseils.

Tout à fait.

Tout à fait.

Même dans notre formation, on parle beaucoup d'empathie.

On met excessivement l'accent sur l'empathie.

Qu'il ne faut pas être sympathique parce que là, on ne devient plus des soignants.

Je l'ai souvent cru.

Les moments où j'avais de la sympathie pour les patients, c'est là aussi que j'ai été
capable d'avoir une alliance thérapeutique avec eux plus importante.

Puis je pense qu'ils ont le droit de savoir qu'on comprend par où ils passent, parce que
soit on y est passé nous-mêmes, puis qu'on comprend que ce n'est pas évident.

Puis les échanges ne sont pas du tout les mêmes quand on parle avec quelqu'un qui est
passé par les mêmes expériences que nous.

Mais je pense que les deux doivent tout à fait cohabiter pour qu'on puisse aller de
l'avant.

Ça, je l'ai compris avec le temps, mais au début, comme je disais, on dirait qu'on avait
l'impression que t'es le professionnel, faut que tu sois neutre, faut que sois là.

On n'a pas le droit de pleurer, ou si peu.

Si on pleure, reprend-toi aussi vite que possible parce que tu n'es plus dans une position
d'aidante dans ce moment-là, alors que c'est juste correct et normal.

Les patients,

ils voient notre vulnérabilité, ils comprennent.

Ça allume d'autres choses auprès d'eux autres.

Ça t'est arrivé de pleurer avec des patients ou leur famille?

Oui, ça m'est arrivé.

Ça m'est arrivé.

Puis je vais te dire plus qu'une fois.

Ça m'arrive, oui.

Ça m'arrive parce qu'on se connaît, puis on a des petites choses qui viennent nous
chercher.

Je donne un exemple.

C'est quelqu'un que j'avais connu, qui était un ami d'un ami qu'on m'avait présenté à un
moment donné.

On avait fait des activités ensemble et tout ça.

Quelques années plus tard, je suis en train de travailler.

Je faisais des stages en oncologie.

J'avais un patient dont je devais prendre soin.

Et je ne me souvenais pas que c'était lui tellement il avait changé.

Et quand je l'ai vu, où il en était rendu, c'est venu me chercher vraiment.

Mais là, il avait des enfants maintenant.

Ses enfants sont venus me voir et ils m'ont remercié en pleurant d'avoir pris soin de leur
père.

C'est sûr que je voyais les enfants qui perdaient leur père.

Je n'ai pas pu m'empêcher de pleurer et d'aller près de lui et de sa famille aussi pour
pouvoir passer les derniers moments ensemble.

Mais je pense que la chaleur humaine qui s'en est dégagée, ce lien-là quand j'ai vu les
enfants, la famille qui me remerciait,

ça vallait tout l'or du monde.

J'étais là pour eux, j'étais là pour les aider à traverser, puis vu qu'on se connaissait
d'une certaine manière plus intimement que juste un patient soigné, je trouve que les

échanges ont été beaucoup plus faciles.

Et quelques mois plus tard, j'ai eu des nouvelles des enfants qui m'ont dit que ça avait
fait une différence le déroulement de tout ça, de la prise en charge, sur leur capacité de

faire leur deuil et de retrouver une vie normale.

J'ai eu la chance de le faire parce qu'ils m'en ont parlé, mais je crois que ça a fait une
différence sur beaucoup de nos patients.

Des fois, la trajectoire de contact entre soignants et soignés, souvent elle est très
courte, très brève, puis ensuite, nous, on continue notre vie de professionnels, puis les

patients retournent de leur côté.

mais je pense qu'on sous-estime l'impact

qu'on peut avoir des fois comme soignants sur la vie entière de quelqu'un d'autre.

Clairement, clairement.

Ça, Steven, ce que tu dis là, c'est un point tellement important parce que j'ai
l'impression des fois qu'on a le patient devant nous, on donne les meilleurs soins

possibles, mais ce patient-là a aussi une femme ou un conjoint, en fait, ou des enfants.

Maintenant, ce que j'essaie de faire dans mes soins, c'est quand je parle des niveaux de
soins, par exemple, pour la planification de la suite des choses chez des gens qui ont des

maladies chroniques...

Bien oui j'ai mon patient, mais j'ai souvent le conjoint ou la conjointe à côté qui est là
aussi et qui est aussi âgé et dont la discussion n'a pas été élaborée.

Des fois, je me permets d'aller justement plus loin avec eux aussi même s'ils ne sont pas
malades, qu'ils ne sont pas sous mes soins.

Les enfants, souvent, ils sont tellement contents parce que des fois ils m'en reparlent en
me disant que

c'était tellement difficile à élaborer et que maintenant, il y a un professionnel qui a
pris le temps de pouvoir en discuter, même si ce n'était pas lui qui était malade.

Ça les aide beaucoup pour la suite des choses.

On ouvre des portes comme aidant.

Je pense que ça va vraiment plus loin que juste ce qui se passe dans la chambre de nos
patients.

On a des patients qu'on suit depuis des années.

Moi, j'aime ça les vraies personnes.

Je pense que je m'attends à ce que les patients aiment ça aussi qu'on soit vrais.

Il faut montrer qu'on peut être vulnérables, montrer qu'on a des sentiments.

On peut être déçus, des fois, puis c'est correct, il faut le nommer.

Je pense que c'est ce qui renforce notre relation avec notre patient.

Je pense à des annonces de mauvaises nouvelles que j'ai faites des centaines de fois, des
annonces de cancers ou des annonces de décès, aussi.

Les gens, parfois, vont se souvenir toute leur vie des mots que j'ai utilisés, de la façon
dont ça s'est passé,

du décor dans la pièce, des odeurs, toutes les sensations physiques de ce moment-là qui
parfois restent comme une blessure même, à la limite.

C'est pour ça que j'essaie le plus possible de prendre le temps.

Souvent, j'ai plusieurs patients sous ma charge.

Éventuellement, donc, j'annonce une mauvaise nouvelle, mais j'ai d'autres patients à
soigner aussi, mais pour ce patient-là, pour cette famille-là, c'est un moment unique pour

eux.

Puis je pense qu'ils méritent d'avoir un moment pour eux qui leur appartient.

Tout à fait.

Ça, c'est très vrai Steven.

La famille, les enfants savent que

si c'est par exemple leur papa qui décède ou leur maman, qu'éventuellement, le prochain,
ça va être leur autre papa ou maman.

Puis ils trouvent une façon de faire la paix avec ce qui va venir quand ils ont vu comment
ça s'est bien passé une première fois avec un membre de leur famille.

Ça m'est déjà arrivé où que, justement, pour le décès, on a pris notre temps.

On a pris notre temps.

Je me souviendrai toujours d'un patient, c'était dans mes grands succès, j'étais contente.

Dans un niveau de soins où on ne faisait pas tout, mais on ne faisait pas rien aussi.

Puis la famille avait de la difficulté à cheminer là-dedans.

Il ne fallait pas qu'il boive trop d'eau.

Lui, il avait soif.

Non, pas trop boire.

Non, pas manger ça, c'est pas bon pour le diabète.

Non pas ci, non pas ça.

À moment donné, je me suis assise avec la famille et j'ai dit, vous savez, ça n'ira pas
mieux au niveau de sa santé.

On est toujours en train de dire non, non, non.

J'ai dit, aimeriez-vous que pour les derniers moments ou le temps qu'il reste, on puisse
lui dire oui à tout ce qu'il lui fait plaisir?

Bien oui, c'est notre père, on l'aime, on veut que ça soit oui.

Alors disons oui à tout ce qu'il veut, puis il va pouvoir s'en aller tranquillement, en
paix et heureux.

C'est tout ce qu'ils avaient besoin d'entendre.

Puis la fille m'avait dit, je sais que ma maman, ça s'en vient dans pas longtemps, puis
j'aimerais ça que ça soit ici que ça se passe parce que ça s'est tellement bien passé.

Je me dis, c'est important le temps qu'on a pris.

Il n'y a rien de pire que de perdre un être cher.

Plus on vieillit, plus on est confronté à des deuils et à des décès.

Tu apportes, je trouve, une belle couleur des soins infirmiers.

En fait, dans votre approche, je trouve qui est différente de notre approche en médecine,
qui est très centrée sur le patient.

On nous enseigne à comprendre le vécu du patient, à comprendre ses attentes, de dépasser
justement les problèmes médicaux.

Je trouve que vous, en soins infirmiers, c'est non seulement le patient, mais sa famille,
ses proches, son réseau, sa communauté, ses croyances.

Je trouve que c'est une approche plus intégrée qui est, je ne dirais pas qu'elle est
meilleure que la nôtre, je ne dirais pas que la nôtre est moins bonne.

Je pense qu'on a besoin des deux, finalement.

Tout à fait.

Je suis vraiment d'accord avec toi, c'est un travail d'équipe.

On ne se le cachera pas, je pense que nous, on fait une bonne équipe.

Justement parce qu'on choisit la clientèle, les patients, en lien avec les besoins du
patient.

Et non pas en lien avec juste ce qu'on a le goût de faire.

Dans le sens où les discussions qui sont difficiles, qu'on sait qu'elles vont prendre du
temps,

qu'on doit impliquer la famille, qui est moins disponible.

Mais c'est sûr que dans une équipe, le médecin qui a beaucoup de patients à tourner, n'a
pas nécessairement le temps d'accorder une heure avec toute la famille à tous les jours et

tout ça.

En quoi l'infirmière ou moi comme IPS, je peux prendre la relève à ce moment-là pour
continuer le bout de chemin avec la famille et bien évidemment être toujours accompagnée

aussi du restant de l'équipe qui est avec moi.

Mais j'ai plus cette disponibilité-là, à être auprès du patient et de la famille parce que
par exemple les soins aigus ont été faits et que là on peut se poser davantage.

Je pense que c'est ça la force

d'un soignant aussi.

C'est de se dire qu'on n'est pas tout seul.

Puis ça, quand on comprend ça, je crois honnêtement que ça fait toute une différence sur
notre pratique.

On est une équipe.

C'est la bonne personne pour le bon patient au bon moment.

Toujours, toujours.

Sachant que c'est un travail d'équipe, on a tous nos petits bouts à faire et tout ne
repose pas juste sur une personne.

Donc cette pression-là de dire que je dois tout réussir à faire tout seul, on ne peut pas,
ça ne fonctionne pas.

Mais quand on comprend qu'on est une équipe et qu'on apprend aussi des autres membres de
l'équipe pour aider à faire cheminer nos patients,

ça enlève beaucoup de poids, autant sur le mental que de poids qu'on ressent physiquement
aussi de nos responsabilités.

C'est sûr, il y a l'aspect aussi médico-légal ou déontologique, de la manière que le
système est conçu.

La responsabilité est beaucoup sur les épaules du médecin, justement.

Mais ce que tu apportes, c'est vraiment essentiel, c'est qu'au-delà de la responsabilité
médicale, il y a un patient, puis il y a sa famille.

À un moment donné, c'est ce que j'ai compris, c'est que je ne suis qu'un seul maillon
d'une grande chaîne qui sert au bénéfice du patient.

Puis, j'ai beau prendre les meilleures décisions médicales possibles, poser des bons
diagnostics, décider des meilleures prises en charge, si je n'ai pas les autres membres de

l'équipe avec moi pour me supporter puis pour offrir les soins,

le patient n'aura pas les soins, justement.

Oui, on a une responsabilité.

Oui, on a une imputabilité, je pense, comme médecin.

Mais ce n'est pas tout.

C'est beaucoup plus que ça, les soins, finalement, aux patients.

Oui, mais une chose aussi que j'ai apprise dans mon rôle, c'est aussi d'écouter le
patient.

Est-ce que le patient veut qu'on fasse vraiment tout ce qui est en notre possible pour
pouvoir l'aider?

C'est une question à se poser aussi.

Alors à ce moment-là, je me dis, si tel n'est pas le cas, il faut respecter sa décision.

Dans ce cas-là, est-ce que ça fait en sorte qu'il y a d'autres professionnels qui peuvent
venir soutenir pour répondre à sa demande?

Un médecin qui va donner les meilleurs soins possibles, si en dessous de lui, dans son
équipe, pour faire la suite des soins, ce n'est pas appliqué,

ça ne changera rien.

On a tous cette responsabilité auprès du patient.

Une des choses que je trouve, honnêtement, comme infirmières, c'est qu'on sous-estime
souvent, souvent nos compétences, notre jugement et nos capacités.

Ça vient jouer aussi au niveau de la santé des soignants.

J'essaie toujours de faire en sorte que quand j'interviens auprès des autres membres de
l'équipe, que je puisse entendre leurs opinions, leurs idées.

Échanger, expliquer le pourquoi du comment je fais les choses, pour justement se dire :
c'est eux la suite de la chaîne aussi.

Donc, on travaille tous pour le même patient et on veut s'assurer que les soins soient
adéquats.

Mais il faut prendre en considération les autres, leurs opinions, leurs idées, aussi.

Un médecin tout seul, il n'y aura pas de suite, ça ne fonctionnera pas.

Parce qu'il ne faut pas oublier que les infirmières, elles passent 8 heures par quart de
travail avec ce patient-là que nous, on va voir que de façon ponctuelle dans une journée.

C'est un très bon point.

J'ai toujours dit que je me méfiais des médecins qui n'étaient pas capables de faire
confiance à une infirmière d'expérience.

Un des points d'enseignement que je fais souvent aux résidents, la résidence est un moment
difficile.

On est en période d'adaptation.

On s'approprie notre rôle de médecin aussi pendant la résidence.

On interagit donc beaucoup avec les infirmières.

Il faut avoir l'humilité justement de savoir que l'infirmière qui est devant nous, qui a
de l'expérience, qui passe 8 heures au chevet de la personne, des fois, ses réflexions,

ses commentaires, ils sont très très pertinents.

Il faut des fois être capable de prendre un pas de recul, puis de dire, bien, OK...

je n'avais pas vu ça sous cet angle-là, puis comment je peux bonifier finalement mes soins
à partir de l'opinion des autres, puis de me nourrir finalement de l'apport que vous avez.

Il y a peut-être un peu d'égo là-dedans, un peu d'orgueil parfois, d'essayer de prouver sa
valeur ou d'essayer de prouver qu'on est capable, mais je pense qu'au-delà de ça, il y a

un patient, puis il y a des soignants tout autour, puis on est une équipe, donc il faut
agir comme

membres de cette équipe-là.

Souvent, on est appelé à jouer le rôle de leader, c'est correct, mais on est le leader
d'une équipe.

On n'est pas deux entités séparées qui menons chacun nos affaires.

On travaille ensemble, pour moi, ça devrait toujours être comme ça.

Puis même je te dirais que de tenir compte de l'opinion des autres professionnels fait en
sorte aussi de nous élever dans notre travail.

Quand on le réalise, que ça nous évite parfois même de faire des erreurs, parfois même de
faire de très bons coups.

Puis au du compte, c'est toi qui prends la décision, mais

c'est important de l'écouter.

Et puis honnêtement, ça joue beaucoup beaucoup sur l'estime de soi

et comment on se sent.

C'est ce qui fait en sorte que j'aime mon travail.

Je n'ai pas l'impression de travailler pour rien, même si la décision finale, dans
certaines situations, ça va être toi qui va devoir la prendre.

Il y a beaucoup de partage de connaissances, puis c'est d'être capable de dire qu'un
leader élève son équipe aussi.

On les amène à un autre niveau.

Moi je dirais pour mon rôle d'infirmière praticienne, entre autres, c'est l'élément le
plus important qui fait en sorte qu'on est bien et heureux dans notre travail.

Parce que les deux, on a l'impression de faire vraiment une équipe.

Puis je crois que les soins qu'on donne à nos patients sont vraiment de très bonne
qualité.

Parce qu'on met tout en place pour que ça fonctionne.

On exploite finalement les forces de tout le monde.

Justement, moi j'ai les connaissances, les compétences médicales.

Je suis l'expert médical, mais je ne détiens pas nécessairement la vérité ou ce qu'il faut
faire.

Puis je n'ai pas de boule de cristal.

Je ne sais pas comment nécessairement le patient va réagir au traitement.

Mais je pense que quand je fais la place à d'autres professionnels en reconnaissant votre
expertise, c'est gagnant, gagnant pour tout le monde.

Tout à fait.

Mais on a tous, tout le monde, notre expertise du début jusqu'à la fin à apporter pour
offrir des meilleurs soins.

C'est sûr, comme infirmières praticiennes, justement, vous êtes un peu à cheval entre les
soins infirmiers et la médecine.

As-tu l'impression que tu es capable d'être un petit peu plus empathique à la réalité des
médecins à cause de ça?

Clairement.

Clairement.

Il y a beaucoup de choses que j'ai comprises.

En fait, je trouve que j'ai le plus beau des deux mondes, dans le sens où j'ai compris
beaucoup de choses sur les prises de décision que les médecins faisaient.

Comme infirmière, des fois tu n'as pas la vision de pourquoi qu'il prend ça parce que ce
pas toujours nécessairement expliqué et c'est correct.

Des fois, on n'a pas toujours le temps.

Mais il y a beaucoup de choses qui sont faites dans l'ombre.

Puis là, maintenant, l'imputabilité, la responsabilité

que les médecins ont, je la comprends encore plus.

Puis, je comprends aussi la réalité des infirmières qui, ne sachant pas tout ce qui est
fait,

ont besoin qu'on leur parle davantage, qu'on leur explique un peu plus.

En étant une équipe, elles nous comprennent, elles nous connaissent.

Parce que des fois, l'anxiété ou la détresse que vivent certaines infirmières, on va se le
dire, c'est le docteur.

C'est la manière dont le docteur va la traiter ou interagir avec elle.

C'est sûr que je pense qu'il faut instaurer une culture de partage.

À l'inverse,

je pense qu'un des messages que j'aimerais que mes collègues médecins comprennent, c'est
que si tu n'es pas capable de parler de ta vulnérabilité en face d'une infirmière ou à une

infirmière - comme ce qu'on est en train de faire en ce moment - si comme médecin, tu n'es
pas capable de faire ça parce qu'on veut se parler entre docteurs...

Je pense qu'il y a beaucoup

d'isolationnisme de la part de la communauté médicale.

On s'est bâti des murs pour protéger notre pratique et nos domaines d'expertise, mais je
pense qu'on s'est enfermés là-dedans.

Puis de se dire que non, ces murs-là n'ont pas lieu d'être, puis on devrait être capable
de se voir, puis de s'entendre

et de se reconnaître entre soignants.

Moi, je pense que la souffrance des soignants est universelle, elle n'est pas médicale.

Toute personne qui agit dans l'équipe de soins peut vivre à certains moments une partie de
la détresse qui est partagée dans tout le processus.

Mais je pense qu'il faut mettre tous les soignants sur le même piédestal.

En ce qui a trait à la souffrance des soignants,

il n'y a pas de hiérarchie.

Ma souffrance n'est pas plus importante que ta souffrance.

Ma réalité est différente de la tienne.

J'ai un niveau de responsabilités qui est différent du tien.

Mais au-delà de ça, je pense qu'on a quand même le droit de s'ouvrir à l'autre.

J'ai aimé le terme que tu as choisi, le niveau de responsabilités est différent, mais est
tout aussi important.

C'est là où des fois j'ai l'impression que, parce que tu es infirmière, tu n'as pas
l'impression que ton niveau de responsabilité est aussi important.

Et pourtant, il l'est tout autant.

Mais il est juste différent.

Donc il faut le comprendre.

Pour moi, j'ai l'impression que ce qui nous aide aussi au niveau de notre santé mentale,
c'est être reconnu dans notre travail.

On l'a un peu abordé au début, cette reconnaissance-là est importante.

Ça, je dirais que c'est en partie au cœur de notre santé mentale comme professionnels de
la santé, de dire que je suis capable de parler, puis on va prendre en considération ce

que je dis, parce que sinon des fois tu te demandes à quoi tu sers, pourquoi tu es là.

Mais si par ta présence, tu sens que tu ne sers à rien, tous les jours tu vas rentrer
travailler, tu n'auras pas de motivation, tu vas être découragé.

Puis là on parle des médecins, mais ça peut être tout le monde, dans le fond.

Mais je pense que ce que j'aimerais, moi, qu'on retienne de ça, c'est qu'on est tous
égaux.

On ne peut pas faire avancer rien si on est tout seul à travailler pour un patient.

Le patient est au centre et je pense que c'est un travail d'équipe.

Ce qui m'amène à parler un peu des solutions.

D'après toi, comment on pourrait bâtir ces ponts-là pour qu'on puisse sentir qu'on est
vus, qu'on est entendus, qu'on est écoutés et qu'on est compris?

...

C'est d'avoir des moments d'échange.

Des moments d'échange, pour moi, je pense que ça serait important au sein de l'équipe.

Je ne dis pas tous les jours, je ne dis pas chaque quart de travail nécessairement, mais
de se fixer des moments où on prend le temps d'échanger avec les autres membres de

l'équipe.

Le cœur pour moi de ce dont je te parle, c'est d'être entendu, d'être capable de prendre
en considération ton opinion.

Il faut que je prenne des moments où je peux mettre ça en place.

Moi, c'est ça que je trouverais important.

L'autre chose, ce que je trouve dans notre système, c'est que notre système de santé met
en place beaucoup de choses pour pouvoir aller chercher de l'aide comme professionnels de

la santé quand on sent qu'on est dépassés.

Mais ce que je trouve triste,

on ne met pas beaucoup dans la prévention.

Quand je parle de la prévention, c'est de voir un collègue par exemple qui va moins bien.

Qu'est-ce que je fais?

Si on doit toujours annoncer des mauvaises nouvelles, on travaille avec des cancers, si on
met des patients en soins de fin de vie et tout ça...

C'est très chargé

émotionnellement.

Qu'est-ce qui est mis en place pour éviter que ça arrive et non pas répondre une fois que
c'est arrivé?

Et ça, je trouve qu'il n'y a pas assez de choses qui sont mises en place.

Puis de ne pas attendre qu'ils lèvent le flag et disent qu'ils en ont besoin, parce que
des fois, ce sont les derniers à s'en rendre compte qu'ils en ont besoin.

Tu as raison, je trouve qu'on est très réactif plutôt que d'être proactif.

Ce n'est pas un problème de connaissances, ce n'est pas un problème tant que ça de
quantité de ressources.

Je sais quoi faire pour aller mieux en général.

Je suis même capable de l'enseigner au patient.

C'est sûr que je sais quoi faire.

Je sais qui appeler,

où consulter, si jamais je vis des difficultés, mais le problème c'est de passer à
l'action.

Pourquoi il faut attendre d'être au bout du rouleau avant de se dire qu'il faut
intervenir?

C'est bien avant ça, bien bien bien avant ça qu'on devrait être capable de faire quelque
chose.

Tout à fait.

Vraiment.

Qu'est-ce qu'on pourrait faire au quotidien?

Nous-mêmes, dans notre milieu, qu'est-ce qu'on pourrait mettre en place dans des
situations comme, par exemple, aux soins intensifs, où on perd un patient?

Où après ça, le personnel peut aller discuter de comment ils ont ressenti.

Ça va peut-être bien, mais de quand même en discuter pour éviter que ça s'escalade par la
suite ou que ça reste et que s'empile sur autre chose.

Puis c'est toujours plus facile de s'améliorer quand on n'est pas dans le fond du baril.

Tu touches à un bon point, c'est que ces activités-là, on va dire de partage, d'après moi,

elles ne devraient pas donc avoir lieu juste au besoin s'il arrive quelque chose.

Je pense que ça devrait être quelque chose qui fait partie de la culture.

Il faut juste commencer, finalement.

Il ne pas attendre d'avoir la solution idéale.

Ça me fait toujours rire quand je vois nos dirigeants nous offrir des solutions et que la
solution, c'est un comité ou

Mmh.

une liste de ressources.

Ce n'est pas ça, le problème.

Les soignants, je pense, ont juste besoin de parler.

Les soignants ont besoin de connecter entre eux, de se sentir vus, entendus dans leur
souffrance.

On n'est pas toujours dans la souffrance non plus.

Des fois, il y a des bons coups, des choses qui augmentent beaucoup notre satisfaction
personnelle.

C'est bien de le partager, ça aussi.

Quand on a bien traité un patient comme équipe, c'est satisfaisant pour tout le monde.

Je pense que de se dire qu'à des intervalles réguliers, on se rencontre pour juste parler.

Oui, tout à fait.

Les échanges, honnêtement, ce que je trouve bien de ça, c'est que ça vient aussi
normaliser un peu des fois ce qu'on vit.

Puis ça, c'est important.

Parce que c'est toujours facile de se cogner la tête, de se cogner le marteau dessus, puis
se dire « t'es pas bonne, t'es pas si, t'es pas ça ».

Mais de savoir, en favorisant les échanges, que d'autres vivent la même chose que nous,
mais qu'on ne le savait juste pas, ça vient normaliser le tout.

C'est une belle source, notre communauté est une belle source aussi d'informations.

C'est ça qui fait la richesse d'une équipe.

On va profiter des bons coups des autres, mettre en place certaines choses pour que nous
aussi, ça nous arrive et que ça nous contamine comme groupe aussi de façon positive.

Je pense qu'un des points essentiels aussi, c'est d'arrêter d'espérer que la solution
vienne d'en haut ou que la solution vienne de l'extérieur parce qu'il ne faut pas se

leurrer.

Le système ne changera pas pour prendre soin des soignants.

Ça n'arrivera pas.

Je pense que comme soignants, on a la responsabilité et le devoir

de s'écouter entre nous, d'essayer de se comprendre.

Finalement, ce sont les soignants qui devraient soigner les autres soignants, puis en
commençant par eux-mêmes.

Hum, tout à fait.

On peut chialer, puis ne pas être content, puis...

Mais qu'est-ce qu'on fait concrètement, nous, pour changer ça?

Qu'est-ce qu'on peut faire pour rendre ça, que ça nous représente, que ça soit connecté à
notre réalité, à notre vie de tous les jours?

Inévitablement, il faut participer pour le faire.

Je pense que ça implique que aussi qu'on se retrousse les manches, puis qu'on se dise...

Bon, parfait, changeons ça, puis adaptons ça

à notre réalité à nous, pour que ce soit efficace puis que ça réponde à nos besoins.

Puis là, on revient au début de la conversation, c'est-à-dire que si je fais des constats
ou que j'ai des insatisfactions, je peux rester là-dessus, mais on contrôle ce qu'on peut

contrôler, puis on se contrôle soi-même.

À ce moment-là, si j'ai des constats, j'agis, puis il faut commencer quelque part.

Puis ce n'est pas obligé d'être compliqué.

Ce n'est pas obligé d'être un grand changement de vie, de grands changements.

Je pense qu'on peut commencer petit.

Comme tu dit, ça contamine, finalement.

Les gens ont ce besoin-là.

Peut-être ils ne savent pas comment commencer.

Ils ont juste besoin d'un petit peu d'accompagnement, mais ça ne prend pas beaucoup de
ressources en tant que tel.

C'est ça, c'est que la solution vient de l'intérieur.

C'est là qu'il faut aller chercher, c'est là qu'il faut aller puiser.

Des fois, par contre, les batteries sont vides, puis le corps a besoin de se reposer.

À cause de ça, parfois, il y a tellement de bruit, de surcharge mentale, de surcharge
émotive,

qu'on n'entend plus la voix intérieure, mais elle encore là.

Il faut juste prendre le temps de se déposer, d'écouter nos besoins, puis de commencer
quelque part.

C'est pour ça que je trouve qu'en planifiant des moments, si toi tu n'es pas capable parce
que tu n'entends plus ta petite voix, juste des fois de t'assoir et d'écouter les autres,

ça fait en sorte que ça va peut-être faire résonner quelque chose en toi.

C'est ça l'accompagnement que je trouve qui est aussi important

dans tout ça.

La pire chose pour moi, c'est l'inertie, c'est de rester à ne rien faire.

Donc, il faut pas juste parler, dénoncer, écouter, mais il faut aussi agir.

Il faut être capable aussi de s'ouvrir aux autres et d'échanger sur ces sujets-là.

Si

tu pouvais parler justement aux soignantes, aux soignants qui vont écouter ce balado-là, à
leurs proches, aux personnes qui s'intéressent à notre réalité, qu'est-ce que tu aimerais

leur dire?

Moi j'aimerais que les gens sachent que bien qu'on ait le titre de professionnels de la
santé, on est des humains.

Qui ont nos qualités et nos défauts.

Mais je pense que la plupart des gens qui sont dans le domaine de la santé, ont à coeur la
santé.

La santé de leurs patients.

Peut-être pas assez la leur, mais il faut s'impliquer, il faut parler.

Il faut s'écouter, parler et agir.

C'est ce que j'aimerais que les gens retiennent beaucoup : s'écouter, parler et agir.

Vraiment.

Je voudrais peut-être juste rajouter s'écouter nous, mais s'écouter aussi entre nous.

C'est ce que j'aimerais vraiment que les gens retiennent.

Et de ne pas avoir peur

de s'exprimer aussi.

En autant de trouver un endroit sécuritaire pour le faire et de l'avoir, cet endroit-là.

Tout à fait.

Et dans l'objectif, c'est toujours que ce soit productif.

Que ce soit constructif.

On veut travailler sur notre bonheur.

On veut construire notre bonheur.

L'objectif, c'est ce soit constructif dans ces échanges-là aussi.

Et puis, dernière question, si tu pouvais parler à Bithiah d'il y a 15-20 ans, qu'est-ce
que tu aimerais te dire ou qu'est-ce que tu aurais aimé comprendre avant ou tu te mettrais

en garde de quoi?

En fait, c'est que je ne pourrai jamais vouloir plus que le patient.

Mais heureusement, je l'ai compris quand même pas trop tard, mais sinon c'est épuisant.

J'enseigne aussi à l'université, ce qui fait en sorte que quand je vois les étudiants qui
arrivent comme IPS, qui commencent, c'est ce que j'essaie de leur dire.

Parce que je les vois s'en aller dans la même voie que moi, m'en vais aussi.

La vie m'a appris que c'est pas nécessairement vers ça qu'on s'en va.

Mieux doser, tout ça, puis

c'est ce qui guide maintenant ma pratique pour les années futures.

Écoute, merci beaucoup pour l'heure qu'on a passée ensemble.

Comme chaque fois, nos discussions sont toujours intéressantes, passionnantes.

Je te remercie pour la vulnérabilité dont tu as fais part aussi.

Puis, je pense aussi que votre rôle

dans le système de soins devrait être valorisé plus.

Puis je pense que sur cet aspect-là, on est un bon modèle, toi et moi, puis c'est un
privilège de pouvoir travailler avec toi.

Bien, merci Steven.

Je pourrais dire que, honnêtement, dans mes réussites dans ma vie, parce qu'il faut aussi
se féliciter, c'est la plus belle chose que je suis contente qu'on ait pu bâtir ensemble.

C'est ça.

Puis je crois fondamentalement que nos patients en sortent vraiment, vraiment mieux.

En tout cas, puis je le dis sans prétention parce que c'est les commentaires que j'en ai.

J'apprécie ta sensibilité, ta vulnérabilité aussi.

Tu es capable aussi d'accepter que ce qu'on t'apporte soit différent de ce que toi tu
penses, mais tu es capable de le respecter et de l'accepter.

Si j'avais la chance de pouvoir dire à tout monde, ayez une équipe comme la nôtre,
j'aimerais ça aussi que ça puisse faire des petits.

Et merci de ton approche.

Et l'idée que tu as eu aussi de lancer ce balado-là, qui, j'en suis convaincue, va venir
rejoindre des gens intimement dans ce qu'ils vivent tous les jours.

Merci encore, puis à bientôt.

À bientôt.

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Créateurs et invités

person
Hôte
Steven Palanchuck, MD
Médecin et fondateur de VociNova – La nouvelle voix des soignants. Créateur du balado Soigner jusqu’à se briser et de MedicaBot - Dialogue & Dx, il met en lumière la détresse des soignants et les enjeux du système de santé.

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