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Épisode 0.5 : Tout le monde a le droit de se sentir bien – Dre Geneviève Brassard, médecin de famille Épisode 5

Épisode 0.5 : Tout le monde a le droit de se sentir bien – Dre Geneviève Brassard, médecin de famille

· 50:26

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"Ah ben...

Me voilà retournée ici dans cette réaction-là.

Je pensais que j'en étais complètement détachée et libérée, mais non, je suis là".

OK, bon, là tu t'en rends compte.

Qu'est-ce que je fais avec ça maintenant?"

Bonjour et bienvenue à "Soigner jusqu'à se briser".

Je m'appelle Steven Palanchuck et aujourd'hui dans ce cinquième épisode hors série, j'ai
le plaisir d'accueillir Dre Geneviève Brassard.

Geneviève a pratiqué en milieu clinique et en enseignement à Sherbrooke.

Elle est aussi formée en yoga et poursuit actuellement un fellowship en médecine
intégrative.

Dans cet épisode, on parle de difficulté à s'arrêter, à prendre soin de soi, même quand on
sait exactement ce qu'on devrait faire.

Parce que le problème, ce n'est pas juste un manque d'information.

On discute aussi de cette idée qu'une fois devenu soignant, on est censé être "arrivé".

Puis du vide qui peut s'en suivre.

Parce qu'un titre, une profession, ça ne suffit pas à donner du sens à une vie.

Puis surtout, on parle de responsabilité.

Trop souvent, on attend après le système.

On espère qu'on va nous donner l'autorisation de ralentir, qu'on va prendre soin de nous à
notre place.

Mais ça n'arrivera pas.

Le changement doit venir de l'intérieur.

Seuls nous pouvons prendre soin de nous.

Bonne écoute.

Pourquoi t'as accepté de partager à ce balado?

J'ai écouté quelques épisodes, puis je me reconnaissais dans plein de choses, puis je
trouve que ça fait du bien d'en entendre parler.

Ça fait du bien d'en parler, donc j'avais le goût d'échanger là-dessus, puis de partager
mon vécu, mon expérience.

Et pourquoi tu penses qu'on n'en parle pas ?

C'est beaucoup plus facile pour moi de dire, je suis blessée au genou...

Ça ne vient pas me chercher.

Mais la santé mentale, on est plus gêné, on est plus réservé d'en parler.

Puis je trouve que, dans le domaine de la santé,

ce n'est pas dans la culture de parler de ces choses-là.

Moi, j'avais appris dans mon parcours à mettre ça un peu de côté dans mes expériences,
dans ma formation, dans ma pratique avec des collègues.

On avait souvent des discussions de surface, mais pas beaucoup des discussions de fond.

On vient comme se déconnecter de ce qu'on vit ou des émotions pour juste parfois arriver à
fonctionner puis à continuer.

Je pense qu'on est habitué d'être dans une relation unidirectionnelle, on dans une
relation patient-médecin.

Moi je pose les questions, puis toi tu me dis les affaires qui se passent dans ta vie.

Des fois, les patients nous disent "Puis vous, comment ça va docteur?" Puis c'est comme
"Ah, oui oui, c'est correct." Mais c'est rare.

On ne va pas vraiment dans le détail.

Personnellement, quand j'avais consulté en thérapie, j'étais un peu sous le choc de devoir
parler de moi.

L'autre, elle ne me disait pas ce qui se passait dans sa vie, c'était à mon tour.

On est moins habitué dans l'autre sens de la relation.

T'as nommé la solitude.

Souvent, on va vivre ces situations-là dans l'isolement, comme si on était les seuls à
vivre ce genre d'émotions-là.

Ça aide de partager, d'en parler aux autres.

Puis il y a tellement eu de moments où en échangeant avec des collègues, quelqu'un dit
quelque chose, puis t'es là, oh wow, oui c'est exactement ça.

Je peux parler de ce que je vis à mon conjoint, à mes amis hors du domaine médical, puis
souvent les gens vont être comme "Oh mon Dieu!" ou ils vont être très sensibles à ce qu'on

vit, mais ils ne peuvent pas comprendre à 100%.

Mais après, quand on parle

à des collègues ou à des amis dans le domaine, on est à un autre niveau, là on peut
vraiment se comprendre.

Puis il faut avouer la vulnérabilité, que ça ne veut pas dire que t'es pas un bon médecin,
que ça ne veut pas dire que t'es pas capable.

C'est juste en fait, t'es plus fort.

Et là, une fois, quand tu arrives à connecter, là, ça, c'est riche.

Et puis ça brasse des choses, mais tout monde en sort grandit, c'est comme vraiment à un
autre niveau.

J'ai souvent eu l'impression, moi aussi, quand je me confiais à des gens qui ne pas dans
le domaine des soins, d'être incompris, en fait, ou d'avoir à me justifier.

Puis c'est vrai que quand je m'ouvrais à des collègues ou à des personnes qui ont traversé
des choses similaires, tout à coup, c'était normal.

Donc je me rends compte maintenant, c'est qu'on vit tous des difficultés à certains
moments de notre parcours.

Puis pour certains, c'est plus difficile à gérer que d'autres en fonction de notre bagage,
en fonction du contexte de vie.

Mais une des choses, je pense, qui revient,

que tu as nommée, c'est le réflexe de survie.

On est en mode survie.

Puis même à la blague, je me fais répondre "Ah, je survie!" avec un sourire.

Mais...

c'est pas drôle quand on y pense, d'être toujours en mode survie.

De toujours sentir qu'on a à se justifier, parfois même à prouver sa valeur.

Ça vient chercher plusieurs choses, je trouve, dans notre identité même.

Je m'identifie comme médecin.

Quand je me présente à une nouvelle personne, "Bonjour, je m'appelle Steven, je suis
médecin", ça va souvent être la première chose qui va sortir, puis pas

par narcissisme, parce que je veux me vanter d'un titre.

Mais on dirait que justement, c'est tellement intense que parfois,

pour moi, ça a pris toute la place.

Puis quand j'ai dû arrêter parce que ça allait moins bien, puis que là je perdais mon
identité de médecin, je me retrouvais devant rien.

C'est tellement intéressant.

Ma relation avec m'annoncer comme médecin et puis dire "Je suis médecin" a vraiment varié
pas mal, je veux pas dire amour / haine, mais ça a changé beaucoup depuis que j'ai

commencé les études en médecine.

J'ai longtemps eu de la difficulté à dire "Je suis médecin" justement parce que c'est
comme si c'est toute ta personnalité, c'est tout toi, puis t'es comme rien d'autre.

Alors que moi je suis comme "Je ne suis pas médecin, je suis moi.

Je m'appelle Geneviève, j'ai étudié en médecine et je pratique

la médecine".

On dirait que je suis plus à l'aise avec cette façon-là de le dire.

Et éventuellement, je ne le disais même plus comme quand j'ai fait ma formation
professeurale de yoga.

Je me souviens, au début, on était comme 50 personnes dans le groupe, puis moi, j'ai pas
pantoute parlé de ça.

Il y a plein de personnes qui me disaient

t'es médecin toi aussi?" Puis pendant un bout, je ne le disais même pas, tu sais,
j'enseigne le yoga, puis des fois je ne le disais pas.

Mais là, je suis comme "OK, non, c'est une expertise quand même incroyable d'avoir des
études en médecine, de pratiquer, d'avoir toutes ces connaissances-là, ces compétences-là

qu'on développe."

On dit je suis docteure, je suis médecin, mais pour moi, je suis plus à l'aise de dire que
j'ai fait un parcours de médecine et voilà.

Ça vient chercher une relation identitaire que mes amis, qui sont dans le domaine du
génie, de la recherche ou autres, n'ont pas la même relation, le même attachement à la

profession qu'en médecine.

Il y a quelque chose de particulier.

Mais très tôt dans la formation, on se fait mettre dans le jeu de rôle du docteur,
justement.

Puis au début, ça sonne faux quand on fait nos pratiques entre nous de questionnaires
médicaux, qu'on apprend à questionner un patient, à se présenter, à annoncer des mauvaises

nouvelles.

Je pense que ce sont des compétences, des connaissances qui sont essentielles.

Puis on nous fait jouer le rôle du docteur.

Puis je me souviens très bien en première année de médecine d'avoir eu un gros syndrome
d'imposteur, puis de dire, "Ben là, attendez une minute, je ne vais pas me présenter comme

médecin : je suis pas encore médecin".

Puis ça a pris du temps, à ce que même

j'assume finalement le fait que je suis devenu médecin, puis que je pratique la médecine,
puis que, oui, je suis docteur.

Parce que là, c'est devenu une partie de moi.

Puis je suis une personne et je suis médecin.

Quand on perd notre rôle, qu'on perd ce titre-là, qu'on doit prendre une pause ou peu
importe...

Je me suis retrouvé devant un espèce de...

Je vais même dire précipice.

J'avais le vertige, c'étaient des questions angoissantes sur le sens de la vie...

Pourquoi on est ici?

Qu'est-ce qui justifie l'existence humaine?

C'était même philosophique, à la limite.

Puis on dirait que là, quand j'enlevais la partie médicale, au moment où est-ce que je
développais mon identité, je n'avais même pas la capacité d'exprimer ce que j'aimais.

On me demandait si j'avais des passe-temps.

J'en avais des passe-temps avant, mais durant les études médicales, durant mon début de
pratique, on est tellement ensevelis que justement, c'est que je me suis senti...

je me suis perdu, je me suis égaré.

Moi, comme personne, c'est comme si on me demandait de devenir quelque chose.

Je pense qu'il y a des étapes un peu obligatoires, on va dire, dans la démarche de devenir
médecin.

Mais des fois, je me dis, il y a des choses que j'aurais aimées comprendre avant.

Je me dis, j'aurais aimé être capable d'avoir un meilleur équilibre plus tôt.

Mais on dirait qu'il fallait que je tombe, que je me blesse, pour apprendre ça.

J'ai tellement de choses à dire.

D'abord, sur ce que tu disais, qu'on se met dans un jeu de rôle, qu'on apprend à jouer le
médecin.

Au début, on dit, je suis étudiante en médecine, mais même à ça, on est comme
inconfortable avec le terme.

Je pense qu'il y a quelque chose de quand même important là-dedans.

Oui, on a un syndrome d'imposteur, mais de reconnaître quand même le processus qu'on fait
dans nos études, puis les connaissances, puis les compétences qu'on acquiert.

Je pense que c'est important, mais effectivement, on joue un peu le rôle.

Moi, je l'ai vécu beaucoup en début de pratique.

Les gens sont comme "Ah oui, le docteur, on ne voulait pas vous déranger".

Je suis comme "Mais on travaille ensemble".

Puis je dis "Appelle-moi Geneviève".

Mm-hmm.

Et puis je dis au patient "Allo, je m'appelle Geneviève Brassard".

Et en plus, moi, il y a l'enjeu aussi d'être une jeune femme médecin.

Ça, c'est un autre enjeu.

Je sentais que j'avais besoin encore plus de mettre mes bretelles.

J'avais comme besoin pour aider mon travail, pour que les gens

comprennent je suis qui dans cette organisation-là qui est le système de santé, dans le
rôle qu'on donne aux médecins, puis que j'avais comme besoin de plus dire "Je suis

Docteure Brassard, c'est moi le médecin".

Et moi je travaille en milieu d'enseignement, c'est moi le médecin responsable.

Parce que souvent je travaillais avec des résidents plus vieux que moi ou des résidents
hommes, puis les gens pensaient que c'étaient eux le patron.

Même là je le dis, mais à l'intérieur, ce n'est pas 100 % confortable, ce n'est pas
tellement moi de dire que "Je suis le médecin responsable".

C'est comme un rôle un peu que je joue.

Mais si je dis aux gens, "Allo, moi c'est Geneviève, je vais m'occuper de vous", les gens
sont comme...

Il y a quelque chose du rôle qu'on joue là-dedans.

Après ça, sur la notion de développement personnel au travers de la médecine, puis au
travers de notre développement professionnel qu'on vit dans les études médicales, dans la

résidence, dans le début de pratique...

Pour moi, je trouve que c'était beaucoup présenté comme quelque chose de linéaire.

J'ai fait mon cégep, j'ai appliqué, j'ai eu la chance, je suis rentrée.

Tu fais tes études, tu fais l'externat, tu fais ta résidence, tu gradues, tu commences à
pratiquer...

Puis à un moment donné, tu prends ta retraite.

C'est comme un peu ça, je trouve, l'idée.

Aussi, le système est organisé pour

qu'on reste à la même place tout le temps à faire la même affaire.

Les gens, quand je commençais à pratiquer, me disaient, on est content, vous êtes jeune,
on va vous avoir jusqu'à la fin, jusqu'à notre décès.

Et là, moi je leur disais, ça dépend à quel âge vous allez décéder.

Je trouvais que c'était beaucoup de pression.

On s'attend que ça va être comme linéaire, que quand tu finis ta résidence, que tu
gradues, que tu commences...

t'es arrivé.

...

trouvé ta job, ta pratique, t'es médecin, c'était ça ton but de ta vie.

Puis là, t'es arrivé, puis tu commences.

J'ai fait le saut beaucoup, là, quand j'ai commencé à pratiquer.

Je ne me sentais pas là du tout.

Pas arrivée du tout.

Puis je me suis sentie comme vraiment perdue.

Puis effectivement, ça prend tellement de place.

Puis t'as besoin que ça prenne la place.

Mais au niveau identitaire, je ne me définis pas, je ne m'identifie pas au travail.

Ce n'est pas linéaire le développement personnel, le développement professionnel : je
pense que c'est circulaire.

C'est tout à fait normal de se poser des questions, d'avoir des moments où on est plus un
moment plus d'expansion, que ça va bien, on se sent un peu plus aligné.

Il y a des moments que ça va bien, il y a des moments où ça va moins bien.

On vit des choses difficiles, c'est moins aligné, on se remet plus en question...

Vu que ce n'est pas quelque chose dont on entend beaucoup parler, bien moi dans les
moments où ça allait moins bien, disons en début de pratique, j'ai trouvé ça vraiment

difficile.

Je mange bien, je fais mon activité physique 150 minutes par semaine, puis je fais mes
respirations, puis je ne me sentais pas plus bien.

Je me sentais brisée.

Qu'est-ce qui se passe avec moi, qu'est-ce qu'il faut que je change?

C'est comme normal, j'avais besoin

de gérer des affaires, puis d'enlever des marques, d'enlever des couches, puis de
descendre, puis de voir...

OK, je suis qui?

Puis là, ça, c'est confrontant.

Puis qu'est-ce qu'il y a?

Il y a beaucoup de vide, là.

Tu me fais penser en fait une image qui est ressortie dans beaucoup de mes entretiens,
c'est celle du train.

On part au début dans un train sur un chemin de fer qui roule en ligne droite.

Il y a des stations prédéfinies, on les connaît d'avance.

On sait quand est-ce qu'on va arriver à la station, c'est prévisible.

Puis on est tous dans le même train.

Une fois qu'on arrive au bout, justement, bien, comme tu as dis, la prochaine étape, c'est
la retraite, puis après...

c'est la mort.

Pris dans son extrême, là, moi, c'est comme ça que je l'ai ressenti.

Quand j'ai terminé, que je suis débarqué de ce train-là, puis qu'on m'a remis les clés de
ma liberté...

Je ne savais pas quoi en faire, finalement, de cette liberté-là.

Cette quête de sens-là, pour moi, elle a été au cœur de mes expériences traumatisantes.

Puis j'ai vécu des difficultés, des pertes,

autant de personnes avec qui j'ai étudiées, de mes mentors, de médecins qui se sont
suicidés.

Puis c'était très confrontant sur ma propre souffrance puis aussi sur ma sensation de vide
intérieur.

Puis je réalisais que j'avais un vide à l'intérieur de moi-même

que j'essayais de combler.

Mais c'est comme d'essayer de remplir un panier percé.

C'est impossible.

Puis la médecine, c'est une infinité de besoins ou d'attentes envers nous.

Puis je me disais, ça ne se peut pas que ça ne comble pas ce vide-là.

À un moment donné, c'est tellement grand, la médecine - c'est un peu comme ça que je
voyais ça - c'est tellement grand,

ce que je vais faire, que c'est sûr que je vais me réaliser, puis que ce vide-là un jour
va disparaître.

Mais il n'est pas disparu.

Puis même quand il arrive des choses insensées comme des décès prématurés,

des personnes que j'ai aimées qui ont mis fin à leur jour, je me suis dit, ce vide-là, si
je ne peux pas le remplir avec la médecine, je vais essayer de le remplir avec d'autres

choses.

Donc, je suis tombé dans les excès.

Puis, de vivre justement ma vie de médecin dans l'excès,

de vivre ma vie personnelle dans l'excès...

mais ça ne remplissait toujours pas ce vide-là.

C'est tellement intéressant.

Je suis tellement désolée que tu aies eu des proches qui se sont enlevé la vie.

C'est vraiment quelque chose de terrible.

Je pense qu'un truc dont on ne parle pas beaucoup, qu'on n'apprend pas beaucoup, c'est à
se connaître et à se connecter à soi, le sentiment de connexion et de sens.

Puis, ça vient toucher la notion de spiritualité.

Puis on en parle, je pense, de plus en plus.

On en parlait dans nos études, mais pour moi, c'était plus par rapport à demander au
patient c'est quoi ses croyances, puis comment ça va influencer notre traitement, puis

tout ça.

La spiritualité, c'est pas la religion.

Qu'est-ce qui a du sens pour moi?

Qu'est-ce qui est important?

De donner du sens aux expériences.

De dire comme...

Ok, je prends un pas de recul.

C'est vraiment intense cette situation-là.

C'est comme épouvantable.

Comment ça me fait sentir?

Qu'est-ce que j'apprends?

Qu'est-ce que je développe là-dedans?

Puis d'y aller là, dans le vide.

Puis c'est pas facile parce que justement, la nature a horreur du vide, mais on fait tout
pour

le bloquer et pour se déconnecter.

Pourquoi ça me fait peur?

C'est où la peur?

Souvent le vide est relié à la peur de la mort, peut être dans ce que tu as vécu surtout
avec les décès de proches.

Ça ramène à la notion de sens.

Pourquoi je suis sur cette terre?

À quoi je sers?

Je trouve que d'avoir une pratique spirituelle, juste de connexion à soi, de trouver du
sens, prendre des moments d'arrêt...

Pour moi, ça veut dire de connecter avec mes proches, de faire du journaling, de faire du
yoga, ça m'aide à comme m'ancrer puis à digérer les expériences, puis à découvrir,

accueillir

ce que je vis, mes émotions, le processus, puis à cheminer vers ma vie, vers mon
quotidien, mais aussi vers quelque chose qui me fait sentir plus animée.

C'est drôle parce que moi, à l'inverse, ça m'a pris du temps à accepter ce besoin-là de
spiritualité ou l'aspect philosophique finalement du sens de la vie, du sens de

l'existence, du rôle de l'être humain,

à cause des expériences que j'ai vécues, insensées ou injustifiées, non méritées.

Donc je me dis, si même des choses comme ça, si cette personne-là peut mourir injustement,
sans raison,

bien ça veut dire que la vie, il n'y a pas de sens à la vie.

Je me dis, on vient de rien, on finit à rien, pis entre les deux, y'a un petit quelque
chose qui s'appelle la vie.

C'est très...

Je trouve...

lourd

de vivre comme ça.

Je sourciliais un peu quand on me conseillait de me connecter à moi-même, puis de vivre
des expériences un peu plus spirituelles.

La quête du sens ou la spiritualité n'est pas quelque chose qu'on devrait se faire
imposer.

Ce n'est pas une lecture de la vie qui devrait nous être transmise.

C'est quelque chose qui doit naître de l'intérieur.

Et on a tous cette petite voix-là à l'intérieur, ce petit monologue

interne finalement.

Puis, à la limite, l'enfant encore à l'intérieur de nous qui a vécu des choses.

Moi quand j'étais à l'école primaire j'ai été intimidé, j'ai été humilié.

c'est sûr que dans mon développement j'ai voulu peut-être compenser

J'adore mon métier, mais une des raisons pour laquelle je suis devenu médecin, c'était
pour venir nourrir ça.

De dire que, bien, si je deviens médecin, les gens vont me respecter.

Je ne ferai plus rire de moi.

Mais après ça, c'est sûr que c'est aussi le contact humain et la connexion à l'autre.

C'est de trouver un équilibre qui part de soi.

Connais-toi toi-même.

C'est très difficile.

Je ne prétends pas avoir les réponses, même maintenant.

Je comprends des choses, j'ai l'impression, sur moi.

Je suis un peu plus à l'écoute de mes besoins aussi.

Puis, à cause de ça, je suis capable de faire la part des choses entre mon identité de
personne, mon identité de soignant, parce que je suis plus à l'écoute de ces pensées-là.

Mais je pense qu'à un moment donné, il faut les confronter.

On peut se mentir à nous-mêmes toute notre vie, puis espérer que les choses changent.

Mais les choses ne changeront pas tant qu'on ne prendra pas la décision de les changer.

Puis moi, ça a été un de mes enseignements.

Je vivais des insatisfactions que je blâmais sur l'extérieur.

Je me suis fait traiter d'une telle façon ou

j'ai vécu telle chose...

D'un autre côté, j'accepte de rester dans cette situation-là.

C'est moi qui refuse de partir.

C'est moi qui refuse de changer.

Je me mens à moi-même.

Donc, à un moment donné, c'est ça, c'est de comprendre, OK, on va se parler franchement,
là.

Moi et moi-même.

Qu'est-ce que je veux?

Est-ce que je veux vivre?

Oui?

OK, bon, on part de là.

Oui, c'est tellement beau, tu sais, ton partage sur ce que t'as vécu à l'école avec
l'intimidation, puis qu'après, c'est sûr que ça crée une blessure, puis que t'as ça en

toi, que après ça crée des réactions.

Peut-être que oui, comme tu dis, ça a contribué à être une motivation.

Mais c'est là, puis juste de t'en rendre compte, puis de le nommer, tu es moins attaché à
ça.

Là, je vis ma vie, puis je continue, puis je fais un pas en avant.

Tu sais, ça fait preuve de connaissance de soi, dans le sens de "J'ai cette réaction-là.

Ah, j'ai ce pattern-là".

Parce qu'on fonctionne dans des patterns, dans des autoroutes mentales parce que sinon ça
serait bien trop compliqué.

Puis on a des façons de faire ou des réactions qui viennent plus rapidement, surtout quand
on a eu un traumatisme ou quand on a eu quelque chose qui nous a marqué, ça vient créer la

réaction de compensation.

Donc quand on s'en rend compte, tu peux dire, c'est ça,

tu "Ah ben...

Me voilà retournée ici dans cette réaction-là.

Je pensais que j'en étais complètement détachée et libérée, mais non, je suis là".

OK, bon, là tu t'en rends compte.

Qu'est-ce que je fais avec ça maintenant?"

Moi, souvent la sensation de peur de ne pas être à la hauteur, puis tout ça.

Donc quand les gens viennent me questionner, questionner mon expertise, ça venait vraiment
me chercher.

Je compensais.

Je pense qu'il y a beaucoup de gens qui doivent être comme ça aussi.

C'est pour ça que je le nomme.

"OK, bon, je suis là, je suis encore de l'autre bord.

Bon, est-ce que je veux rester là?

J'étais encore frue".

Et puis j'ai encore l'impression qu'il faut que je sois comme un paon.

Il faut que je sorte ma grosse parade pour leur montrer tout ce que je sais.

Bon, ça je ne me sens pas à l'aise.

Qu'est-ce qui est là?

Bien, je me sens vulnérable.

C'est un domaine de soins où j'ai moins d'expertise, peut-être, ou cette situation
clinique, il y a quelque chose qui me chicote.

OK, ça veut dire que je vais demander à un collègue ou encore le nommer aux patients.

Je ne suis pas certaine exactement encore de ce qui se passe.

Les patients aiment ça quand on leur nomme ça et qu'on ne fait pas semblant.

Je ne sais pas exactement où je vais...

Voici notre plan pour l'instant, on va se revoir bientôt.

Puis là je suis capable de réécrire l'histoire, de réécrire la suite des choses.

C'est confrontant.

Mais quand on se permet de visiter, puis d'être honnête avec nous-mêmes, de mettre de la
lumière sur ces zones-là, bien justement, on peut

changer l'histoire.

C'est pas facile, mais la prochaine fois maintenant qu'est-ce que je fais?

Puis l'exercice est plus facile après.

C'est le principe des circuits neuronaux, des habitudes qu'on prend, qu'on développe.

C'est sûr, le cerveau humain est adapté pour lutter pour la survie en tout temps.

C'est sûr qu'on veut conserver l'énergie.

Le cerveau va toujours choisir les circuits qui sont les plus faciles,

les plus fortement imprégnés.

Même, cette compréhension-là me permet de devenir un meilleur soignant, je trouve, avec
mes patients.

Parce que maintenant, je comprends que l'expérience de la maladie, telle qu'on la voit
dans les livres avec des listes de critères diagnostiques, des listes de traitements,

c'est

une chose.

Mais les patients ne sont pas des maladies, les patients sont des humains, des personnes,
qui ont un vécu, qui ont une histoire de vie, qui ont eu des traumas, qu'ils soient

physiques, psychologiques, peu importe.

Puis ces circuits neuronaux-là ont été entraînés.

Et puis c'est sûr que des fois le corps va s'exprimer

de manière qu'on a de la difficulté à expliquer facilement, scientifiquement.

Un exemple que j'utilise souvent, c'est la COVID, le syndrome post-COVID.

Dans ma pratique d'interniste, j'ai beaucoup de patients avec syndrome post-COVID.

Puis, je me suis rendu compte, après le début de la pandémie,

que je recevais beaucoup de ces patients-là en consultation pour des tableaux complexes,
inexpliqués.

Puis là, je me suis dit, on ne peut pas avoir une épidémie de fibromyalgie.

OK, on s'entend.

Donc, je me suis dis, il y a quelque chose de

neurobiologique en dessous de ça.

On ne peut pas avoir plein de patients qui, tout à coup, par hasard, arrivent avec des
symptômes similaires, des douleurs diffuses similaires, des difficultés à gérer leur

énergie...

Puis après ça, de comprendre que si ton cerveau est malheureux, dans le sens large du
terme, parce que je ne dors pas bien,

parce que je n'ai pas une bonne hygiène de vie, je n'ai pas une bonne alimentation, je ne
fais pas attention à moi, je vis de l'anxiété, de la dépression, des stresseurs

chroniques...

Bien c'est sûr que le cerveau va choisir les circuits neuronaux qui sont là depuis
longtemps.

Puis parfois, ce circuit-là, quand il vit un trauma comme la COVID qui atteint le cerveau,
entre autres,

bien ces circuits-là vont apparaître ou il y a des connexions anormales qui vont se faire.

Puis on a des syndromes de douleur chronique, on a des syndromes de fatigue chronique.

Puis après ça, quand j'ai compris ça sur moi, de justement voir à quel point notre
parcours de vie a un impact sur la manifestation de nos maladies,

ça a changé complètement ma vision de la médecine.

Parce que je me suis dit, OK, oui, je suis spécialiste en médecine interne, j'ai une
expertise, mais ça dépasse beaucoup plus que ça, mon rôle, finalement.

Si je veux accompagner les patients, par exemple, avec syndrome post-COVID, bien oui, il
va falloir que je développe mes habiletés un peu de psychologue parce que ça fait partie

du problème.

Il faut le nommer.

Il y a des explications neurobiologiques.

Moi, je suis très cérébral comme interniste, je veux comprendre.

Mais ça s'explique.

Puis ça, pour moi, ça vient m'apaiser.

Oui, puis ça vient donner un sens tout autre à la pratique parce que tu ne viens pas juste
diagnostiquer des affaires.

En plus, on a l'immense chance comme médecin, quand on a une relation de soins avec nos
patients, de les connaître bien.

"Hey, ça se peut qu'il y ait un lien avec telle chose?" Quand ton patient est comme…

"OK, OK, je comprends..." C'est magique.

En ce moment, je fais un programme d'études en médecine intégrative.

Essentiellement, il y a tellement de données là-dessus.

C'est juste qu'on n'en parle pas beaucoup.

On peut

se sortir de ce cycle-là puis se détacher, se désidentifier de ces patterns-là, de ces
pensées-là, de ces réactions-là.

Au lieu de dire, "Je suis un imposteur", t'es comme, "OK non, je me sens menacée dans mon
expertise professionnelle".

Mais une chose que j'ai comprise aussi, c'est que si on constate qu'on a des circuits
neuronaux, on peut recréer de nouveaux circuits neuronaux.

On peut créer des nouvelles connexions avec la plasticité neuronale.

Les connexions des neurones ne sont pas définitives, permanentes.

C'est comme ça en fait qu'on peut changer.

C'est comme des sentiers dans la neige.

Plus on va marcher, plus les sentiers deviennent imprégnés.

Puis si je vous demande de prendre une nouvelle route qui n'a pas été défrichée, c'est sûr
que ça va être difficile au début parce qu'il faut ouvrir le chemin.

Ça n'a pas été fait.

Si je vous demande d'apprendre une langue.

Si on s'expose, si on répète, si on a des stimuli qui vont dans ce sens-là,
éventuellement, ce qui est très difficile au début devient de plus en plus facile.

Changer nos habitudes de vie,

notre hygiène de vie, ça prend du temps.

Par exemple, une démarche de psychothérapie, c'est ça finalement, c'est de recréer des
nouveaux circuits neuronaux.

Mais les neurones ne font pas ça en une nuit, tout comme on s'attendrait pas d'une autre
personne d'apprendre l'espagnol en une nuit.

Donc, pourquoi, par exemple, quand on a un collègue qui ne va pas bien,

ou même ça peut être en dehors du travail, une personne de notre entourage qui ne va pas
bien au point de vue de la santé mentale et qu'on lui dit "Pense positif" ou bien

"Repose-toi puis ça va bien aller".

"Au moins, là, tu as eu ou tu as des vacances qui s'en viennent".

C'est ça.

Pourquoi on s'attend justement à ce que ces nouveaux circuits-là se forment du jour au
lendemain?

Ça n'arrivera pas.

Le corollaire de ça, c'est que ça prend des efforts, par contre.

Ça prend une dépense d'énergie qui vient de la personne, qu'il faut qu'elle soit capable
de mettre.

Puis des fois, le problème, c'est qu'on n'a tellement plus

d'énergie.

Quand j'ai eu les batteries à terre, je savais quoi faire pour aller mieux.

Ce n'était pas un problème de connaissances, c'était de passer à l'action, c'était de
briser l'inertie.

C'est ça qui est difficile.

Quand t'es vidé, comment aller mieux?

J'ai deux choses.

Justement, le repos.

Je pense que c'est quelque chose qui est tellement important et on n'est pas...

je pense que la société en général, et encore plus en domaine de la santé,

on n'est vraiment pas bon.

Puis on ne connaît pas beaucoup les pratiques de repos.

Je ne suis pas capable de faire la sieste.

Ou j'ai dormi le nombre d'heures correctes la nuit passée.

Puis je suis quand même fatiguée.

Qu'est-ce qui se passe?

On peut se sentir brisé.

Moi, j'ai besoin de beaucoup de sommeil.

Fait que, coudonc, qu'est-ce qui se passe avec moi?

Etc.

En plus comme médecin, comme professionnel, on nous met dans des situations pas possibles
de garde.

Les semaines d'hospit, c'était du vendredi au vendredi, 24 heures sur 24.

The show must go on.

J'ai beaucoup de collègues qui travaillaient le lendemain de garde au bureau.

Moi, je l'ai fait une couple de fois et ça ne marchait vraiment pas.

Je faisais ma job, mais ce n'était pas facile et je n'étais pas très belle à voir aller.

J'étais cynique, c'étaient comme des signes d'épuisement, vraiment.

On ne parle pas beaucoup de repos, des pratiques, de faire la sieste, de faire des
activités relaxantes, la respiration...

On veut être efficace parce qu'on n'a pas le choix, parce qu'on est dans un niveau
d'urgence constant parce que c'est très intense la pratique, la vie.

Que là c'est go go go.

Puis là, si je m'arrête, d'un coup je ne me sens vraiment pas bien et c'est pire.

Justement quand tu as les batteries à terre, c'est sûr que ce n'est pas facile de manger
tes fruits et légumes, t'entraîner, faire ta psychothérapie.

Tu le sais.

Je le sais et pourquoi je le fais pas, pourtant je suis au courant, puis je suis bien
éduquée, puis j'ai les ressources, puis je suis privilégiée.

Mais on n'est pas très bon pour se reposer.

Puis je pense qu'on se désensibilise, c'est-à-dire qu'on est tellement habitué d'être en
surmenage, de travailler comme des débiles, de ne pas beaucoup se reposer.

Tout le monde autour de toi, c'est ça.

Quand il faut se reposer, c'est vital.

Si ce n'est que dans une journée, de prendre 10 minutes, fermer les lumières au milieu de
la journée entre deux patients, puis ne rien écouter, puis respirer.

Mais là, OK, il faut être à l'aise de connecter au vide intérieur.

Tu ne fais rien, tu n'écoutes rien, puis tu n'es pas habitué, ça prend de la pratique,
mais on peut y arriver.

Puis, ça revient après ça à la connexion à soi, puis à apprendre à se connaître.

Puis, on dirait qu'il y a comme une relation.

On a une relation étrange avec le self-care.

Je pense qu'on mérite tous de bien se sentir et de sentir qu'on apprécie la vie.

On a une relation aussi intéressante avec ça parce qu'on dit, on recommande à nos patients
certaines pratiques qu'on a de la difficulté à faire nous-mêmes et que beaucoup de gens ne

font pas eux-mêmes.

C'est un peu comme "Faites ce que je dis, mais pas ce que je fais".

Puis je pense qu'on gagne à être des modèles de rôle.

Ça ne veut pas dire que pour la personne à qui tu en parles, que ça va cliquer, mais il y
a une connexion quand tu l'as pratiqué ou quand tu as expérimenté différentes choses qui

t'amènent à un autre niveau.

"Hey voici, on va respirer ensemble, je vais te montrer comment faire".

Ça amène un autre niveau complètement.

Tu nous nommais une chose qui était intéressante par rapport à la société dans laquelle on
vit où tout doit être vite, immédiat, résultat immédiat.

Donc c'est sûr que c'est plus difficile quand il faut recréer des circuits de faire
l'effort

qui est nécessaire pour que ça arrive, puis surtout de le soutenir dans le temps.

Parce qu'on est capable de faire plein de changements, parfois très drastiques.

On peut s'adapter à des choses très intenses, mais qu'on n'est pas capable de soutenir sur
le long terme.

Puis, une des choses que mon expérience avec les problématiques de santé mentale

m'a fait réaliser, c'est que justement, il faut prendre le temps avec les patients de
comprendre c'est quoi les sources de ces problèmes-là, puis de les accompagner là-dedans.

Puis je pense que c'est très apprécié de la part des patients quand on s'ouvre un peu.

Il faut garder une saine distance, la posture empathique.

Mais je pense que quand les patients sentent qu'on comprend, qu'on peut un peu mieux
s'imaginer la situation dans laquelle ils vivent, ça bonifie la relation finalement.

Quand on a une alliance thérapeutique

qui est plus forte, les traitements vont mieux fonctionner.

L'effet placebo, je veux dire, ce n'est pas zéro, c'est un effet réel.

C'est mieux ça que pas de traitement.

L'absence de traitement est pire que l'effet placebo.

Le statu quo est pire que l'effet placebo.

Il y a l'effet nocebo aussi.

Si je pense que quelque chose ne va pas fonctionner pour moi, que je mets les choses en
échec avant même d'essayer, le cerveau va me donner les effets secondaires.

Parce que le corps, le cerveau nous parlent.

Il faut juste apprendre à les écouter et à rester humble.

Il y a des choses que la médecine ne peut peut-être pas expliquer encore, mais qui ont une
base scientifique.

Et puis je pense qu'autant qu'on peut voir tous les symptômes, mais aussi tous les
symptômes de santé mentale, toutes les émotions qu'on vit, les sentiments physiques, les

sensations, ce sont des signes des processus physiologiques sous-jacents dans le corps.

L'enjeu avec nos médicaments c'est qu'ils sont trop bons, dans le sens que ça va
fonctionner,

mais ça ne va pas vraiment renverser les processus sous-jacents.

C'est un peu la même chose avec la santé mentale, je trouve, justement.

Des fois, on veut la solution facile.

Ok, je vais prendre des vacances, je vais prendre une bière.

Je pense que l'alcool, c'est quelque chose qui est quand même banalisé dans la société en
général.

Je peux travailler à développer l'aptitude et le courage d'aller regarder ce qui est là.

Puis je pense que des fois ça fait peur beaucoup, surtout quand on est dans une pratique.

C'est comme go go go, on continue, ça fait peur parce qu'une fois que tu te mets à être
honnête avec ce que tu vis, là, qu'est-ce que tu acceptes et qu'est-ce que tu acceptes

pas, et qu'est-ce que tu fais avec ça?

Mais pour moi, c'est comme une des premières étapes vers justement un cheminement vers la
connexion, vers trouver du sens, puis vers remplir ce vide-là, mais en fait,

l'apprivoiser.

Parce que tu sais, on est tous nous-mêmes.

C'est tout déjà là, c'est tout déjà à l'intérieur.

La résilience, c'est

de se donner le droit, de se pratiquer à voir ce qui est là, puis à voir les émotions
qu'on vit, les processus qu'on traverse.

Puis je pense que c'est tellement nécessaire pour les professionnels de la santé parce
qu'on vit beaucoup des affaires, qu'on vit des situations particulières.

Puis c'est comme une opportunité de cheminement qui est en ordre.

Ce qui m'amène à parler des solutions, en fait.

D'après toi, qu'est-ce qui pourrait briser cette inertie-là, le statu quo?

D'arrêter justement de dire "Faites ce que je dis, mais pas ce que je fais"?

Comment passer à l'action?

Il y a déjà comme un statu quo qui est en train de se renverser dans le sens...

il y a un certain momentum vers le changement.

Puis je trouve ça vraiment inspirant et intéressant.

Puis après ça, je pense qu'il y a une initiative personnelle de chaque personne qui peut
se sentir touchée.

Puis d'être comme, est-ce que je veux me sentir mieux personnellement et
professionnellement?

Je pense que ça passe par l'humilité, ça passe par l'ouverture, par la connaissance de
soi.

Puis j'ai l'impression après ça que quand individuellement c'est quelque chose qui se
passe après ça on en parle, puis là on connecte, puis là ça prend de l'ampleur petit à

petit, ça fait boule de neige.

Je pense qu'une des choses moi qui m'aide le plus en fait, c'est que j'attendais souvent
d'avoir la motivation pour agir.

Je me rends compte que c'est l'inverse.

C'est-à-dire comme la démarche que je fais en ce moment avec le balado, je l'ai longtemps
planifiée.

Ça fait plus d'un an que je cogite à ça puis que je fais des plans puis...

À un moment donné, je me rends compte qu'il faut passer à l'action.

Il faut commencer quelque part, puis après ça, la motivation vient.

C'est avec l'action, les comportements, les habitudes qu'on se sent d'une certaine façon.

L'exercice physique est un autre bon exemple.

Si j'attends d'avoir la motivation d'aller au gym, je vais attendre longtemps.

Mais si je vais au gym, que je donne mon 110%, ensuite je suis sur les endorphines, puis
là je me sens bien, bien là, mon corps apprend, "Ah mon Dieu, je me sens bien, je veux

répéter ça".

La motivation va venir après.

Donc, il faut arrêter d'espérer aussi l'autre corrolaire de ça, je pense, pour les
soignants,

d'arrêter d'espérer que la solution vienne de l'extérieur parce que le système ne va pas
changer.

Le système ne va pas commencer à prendre soin de nous.

Il faut prendre soin de nous et seul nous pouvons prendre soin de nous.

Oui !

Moi aussi j'ai l'impression que ça vient d'en bas.

C'est intéressant le commentaire que tu fais par rapport à la motivation.

C'est difficile de faire quelque chose que tu n'as jamais fait.

Mais, OK...

Est-ce que je peux essayer de le faire?

Tu parlais du gym, mais t'sais, pis moi je suis beaucoup dans, "OK, essayez comme...

juste un petit peu."

Un exemple, mon chum, ça fait un bout qu'il me dit "J'aimerais ça, apprendre à méditer ou
à respirer", puis là il m'en parle, puis là c'est comme il lit là-dessus, il est en génie,

il a lu tout l'internet.

Puis là j'étais comme, "Hey, veux-tu, après qu'on couche les enfants, on va faire cinq
minutes, je mets quelque chose sur mon téléphone, les deux on ne réfléchit pas, sur une

application.

C'est un no-brainer, on n'a pas de motivation.

Ça prend un peu de discipline de dire, on le fait, mais c'est cinq minutes, ça ne dure pas
longtemps.

Ça fait deux semaines maintenant.

Ça a juste changé nos soirées parce qu'après on est comme plus reposés, puis on est plus
déposés, puis ça change l'énergie.

Fait que juste comme un petit pas pour l'intégrer dans le quotidien.

Puis après ça, je pense que d'essayer de faire les changements pour nous, ça fait vraiment
comprendre ce qu'on demande à nos patients.

Mais de se donner le droit, d'essayer de faire différemment, d'essayer de ne pas réussir,
de faire un pas en arrière, de recommencer.

Et on est tous dans cette démarche-là.

Comme je vous disais tantôt, c'est circulaire, c'est pas linéaire.

Si tu pouvais parler à Geneviève d'il y a 15 ans, qu'est-ce que tu aurais aimé comprendre
plus tôt ou savoir plus tôt?

Quinze ans...

Que je n'ai pas besoin d'essayer d'être une autre.

Que je n'ai pas besoin de mettre un masque ou de faire différemment ou de cacher un peu ma
couleur ou qui je suis ou mes différentes passions ou mes intérêts, que je peux être moi.

Non seulement c'est correct, mais c'est encore mieux que la version aseptisée.

Il y a des soignants qui vont écouter ce balado-là, des soignantes, des proches, des gens
qui veulent apprendre plus sur notre réalité, qu'est-ce que tu aimerais leur dire?

J'aimerais leur dire

que Tout le monde mérite, chacun, chacun de nous, tout le monde mérite de se sentir bien.

Tout monde a le droit.

Pas besoin de raisons.

Pas besoin

de travailler plus pour après ça se donner de l'espace.

Tout le monde a le droit de se sentir bien maintenant.

Après ça, c'est un chemin pour beaucoup de gens.

C'est quelque chose qui demande de proactivement être actif et qui s'entretient tous les
jours.

C'est juste comme tous les jours de faire quelque chose qui fait du bien, de travailler à
se sentir aligné, puis de se donner de l'espace de se connaître.

Merci énormément Geneviève pour l'heure qu'on a passée ensemble.

Ça a passé très vite et je suis content qu'on ait pu toucher à plein de sujets.

Merci pour ton partage.

Ça me fait vraiment plaisir.

Merci pour la discussion.

Aussi, ça m'allume beaucoup.

Merci pour ton projet.

Bravo d'avoir mis en action ton projet de balado, que tu envisageais depuis longtemps.

Je pense que c'est très intéressant et nécessaire.

À bientôt.

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Créateurs et invités

person
Hôte
Steven Palanchuck, MD
Médecin et fondateur de VociNova – La nouvelle voix des soignants. Créateur du balado Soigner jusqu’à se briser et de MedicaBot - Dialogue & Dx, il met en lumière la détresse des soignants et les enjeux du système de santé.

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